Dans les colonnes du courrier des lecteurs des DNA du 25 septembre 2021, deux adjoints à la maire de Strasbourg répondaient aux nombreuses critiques publiées par le quotidien au sujet du permis de construire rue de Bussière.
Pour rappel, un permis a été accordé à Nexity, un promoteur immobilier, pour construire 31 logements sur un terrain de 35 ares, détruisant au passage un petit bois et un espace vert à la Robertsau.
Or, comme l’indique le collectif de riverains à l’origine de la pétition en ligne contre ce projet, cette rue appartient à une zone qui fait l’objet, à l’initiative de la Ville et de l’Eurométropole, d’une « servitude en l’attente d’un Projet d’Aménagement Global (PAG) dans le cadre de la modification n° 3 du PLUi. »
Dans leur réponse, les édiles font valoir en substance qu’en 2020, avant l’entrée en vigueur du PAG en question, Nexity avait
« obtenu (de droit) un certificat d’urbanisme l’autorisant à déposer une demande de permis de construire sous le régime des règles du PLU en vigueur à la date de la demande de ce certificat. Il en découle qu’il n’avait plus l’obligation de respecter le PAG, devenu opposable en juin dernier. »
Moralité : Nexity étant dans son droit, la municipalité ne disposait d’aucune marge de manœuvre pour lui refuser le permis de construire demandé.
PAG, PLU, certificat d’urbanisme, permis de construire, autant de notions juridiques qui n’ont guère le parfum des bois et des champs, mais qui fleurent bon… la technocratie.
Parfaitement à l’aise dans le maquis des règles d’urbanisme impénétrable aux citoyens, certains promoteurs font fi de la volonté des habitants de préserver leur environnement. Ainsi, Nexity a réussi en l’occurrence un tour de passe-passe juridique qui lui permet d’échapper aux nouvelles règles d’urbanisme moins favorables aux promoteurs, comme l’explique un article publié le 10 octobre 2021 sur Rue89 Strasbourg.
« Après deux refus consécutifs de permis de construire, l’entreprise a demandé un certificat d’urbanisme, un simple document administratif qui est de droit pour chacun. Cette requête fige la situation juridiquement pour 18 mois. Ainsi, Nexity n’était plus lié par la révision du Plan d’urbanisme alors menée par les écologistes et votée le 25 juin 2021. La municipalité prévoyait d’établir un Programme d’aménagement global (PAG), ce qui a minima figeait la situation du bois quelques années (5 ans maximum) et [permettait] de réfléchir à comment insérer des constructions sur cette parcelle. »
Face à ce qu’elle appelle une « équation complexe », Suzanne Brolly, l’adjointe à l’urbanisme de Strasbourg,
« propose d’aller vers la population pour expliquer “ce qui est autorisé aujourd’hui, ce qui peut apparaître demain si on ne change pas le PLU et (…) d’identifier collectivement des espaces à préserver” pour la prochaine révision, qui nécessitera une à deux années. Une manière aussi de dire que tous les espaces, notamment privés, ne peuvent être sacralisés. »
Comme quoi tout passe décidément par une nouvelle modification du PLU, puisque de nombreux espaces verts, petits bois, et champs, sont actuellement constructibles, y compris tout le secteur du Baggersee… À nous de faire entendre notre voix pour que ce poumon vert soit préservé.